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mardi 16 février 2016

MYTHOLOGIE MAYA - INTRODUCTION


Un jaguar est sacrifié pour les dieux

L'histoire de la civilisation maya n'est pas aussi passionnante (ou plutôt passionnée) que celle des aztèques ou encore des incas, mais pourtant, les mayas fascinent et sont empreints d'un certain mystère (notamment autour de leur "disparition"). Nous en avons gardé à juste titre leurs sacrifices sanglants avec arrachement du cœur, leur férocité au combat face aux envahisseurs espagnols, leurs cités abandonnées recouvertes par la forêt tropicale ou encore leur savoir en Astronomie et en prédictions. Quel peuple ! Pourtant, dans la conquête espagnole du territoire maya, point de passion ni d'évènements vraiment marquants, comme par exemple la Bataille de Cajamarca pour les Incas et la détention du dernier souverain inca Atahuallpa. À vrai dire, le désintérêt espagnol vis à vis de cette région au profit de leur voisin aztèque (où l'or abondait) y est pour beaucoup de choses.

L'originalité de la civilisation maya tient sur le fait qu'elle ne s'est jamais développée autour d'un peuple politiquement et culturellement unifié, et cela, même à l'arrivée des espagnols. Ici, pas d'empire tenu par un Intipchurin (Inca) ou un Huey Tlatoani (Aztèque), mais plutôt une multitude d'états indépendants et rivaux, avec des divergences plus ou moins prononcées dans la langue et la culture. Selon les époques, il y a eu des alliances, des sphères de domination, mais rien n'a tenu assez longtemps pour parler d'unification du territoire maya, comme on a pu le voir par exemple chez les Mésopotamiens et le fameux Empire d'Akkad fondé par Sargon. Ainsi, ce territoire maya, il est important de le séparer en deux parties : les Basses Terres (Nord) et les Hautes Terres (Sud), qui ont une histoire culturelle différente. Certains n'hésitent pas à le séparer même en trois parties culturellement très différentes, avec les Basses Terres méridionales (zone centrale), les Basses Terres septentrionales (le Yucatán - zone nord) et la côte Pacifique incluant les Hautes Terres  du Guatemala (zone sud). Je me répète mais cela est important : pas d'unification, mais seulement une multitude de cités-états rivales de taille et d'importance variables, qui a logiquement provoqué des guerres fréquentes et une instabilité politique perpétuelle sur tout le territoire maya. Il y a eu des alliances, certes, mais jamais durable.




À l'opposé des Aztèques, qui se trouvaient au sommet de leur gloire à l'arrivée des espagnols et du terrible Hernan Cortès, la civilisation maya avait, elle, déjà décliné pour des raisons que nous verrons un peu plus loin (et qui encore mal comprises). Autre contraste saisissant par rapport aux aztèques : les espagnols ne trouvèrent pas de richesses minières dans les territoires mayas, mais qu'un environnement très hostile ("enfer vert") et une résistance surprenante. De plus, de nombreuses ruines cachées par la forêt sont restées insoupçonnées durant la conquête. Elles ne seront redécouvertes qu'à la fin du 18e siècle, jusqu'à la fin du 20e siècle !! Ouais, je sais, ca sens quand même la conquête désastreuse pour les espagnols... bien fait !

Mais que veut bien dire le mot "Maya" ? Il semblerait que cela veuille dire "Maïs", les mayas eux-mêmes se désignant comme "les hommes du maïs" depuis fort longtemps. Vous verrez dans leur mythologie que le maïs y joue en effet un rôle primordial, ce qui donne une certain cohérence au terme.

Il y 3 grandes périodes à retenir, dont certaines sont elles-mêmes divisées en sous-parties (mettez-vous bien en tête que les dates proposées sont approximatives et ne servent que de repères) : 

01. PÉRIODE PRÉ-CLASSIQUE (-2000/+250) 
  • PRÉ-CLASSIQUE ANCIEN (-2000/-1000 ou -800).
  • PRÉ-CLASSIQUE MOYEN (-1000 ou -800 /-400).
  • PRÉ-CLASSIQUE RÉCENT (-400/+250).
02. PÉRIODE CLASSIQUE (+250/+950) 
  • CLASSIQUE ANCIEN (+250/+600).
  • CLASSIQUE RÉCENT (+600/+800).
  • CLASSIQUE FINAL (+800/+950) .
03. PÉRIODE POST-CLASSIQUE (+950 /+1542)
  • POST-CLASSIQUE ANCIEN (+950/+1250) .
  • POST-CLASSIQUE RÉCENT (+1250/+1542).

Autant vous le dire tout de suite : vous trouverez certainement des dates un peu différentes concernant les différents périodes. J'ai moi-même remarqué cela dans mes lectures. Ainsi, un coup la période classique se termine en 900, un coup en 950 ; un coup le pré-classique commence en -2000, un coup en -1000 (un millénaire de décalage !). Qui est le plus près de la vérité ? J'ai décidé d'obéir à la règle du plus grand nombre, mais également de suivre les auteurs que je considèrent comme les plus illustres dans le domaine.

Le plus important est de commencer par la base, à savoir de définir la Mésoamérique. Ou plutôt de voir une carte explicite :


On peut voir que cela concerne les Aztèques et les Mayas, mais pas les Incas. D'où l'utilité de bien comprendre où se situe la Mésoamérique. Et oui, ne mélangeons pas tout ! L'aire culturelle maya occupait (en gros) les territoires actuels du Guatemala (département du Peten), du Belize, du Honduras (ouest), du Salvador (nord) et du sud du Mexique (état du Chiapas).


Nous voyons ici très la séparation entre les basses terres (Nord) et les hautes terres (Sud).


Maintenant que nous savons tout cela, passons aux mayas eux-mêmes.

Peuples Mayas : Yucatèques, Quichés, Cakchiquels, Tzotzils, Tzeltals, Mam, Kekchis, Tojolabals, Mopan, Ch'ortis, Ch'ol, Chontal, Poqomam, Ixil, Jakaltèques,...

LA PÉRIODE PALEO-INDIENNE (-12000/-7000)
Soyons tout de suite clairs : nous ne savons presque rien de cette période lointaine, si ce n'est que des bandes de chasseurs-cueilleurs parcourent le Nouveau Monde, très certainement arrivés depuis le détroit de Bering, faisant office de "pont de glace" entre l'Asie et ce que l'on appellera plus tard l'Amérique. Cela va se traduire par plusieurs vagues migratoires sur ces nouvelles terres jusqu'à la fonte des glaces, qui aura pour conséquence directe l'isolement du continent sur le reste du monde. Un spécialiste pourrait pour en dire bien plus que moi, mais je n'ai pas cette prétention. J'essaierai d'agrémenter cette période au fil de mes lectures, mais est-ce vraiment important d'en savoir plus ?

Alors que devons-nous retenir de cette période fort lointaine ? Des chasseurs-cueilleurs atteignent le Nouveau Monde et le parcourent. Certains finirons bien entendu par arriver en Méso-Amérique.

LA PÉRIODE ARCHAÏQUE (-7000/-2000)
Cette période se distingue de la précédente par l'application d'un mode de vie sédentaire et un certain développement, notamment la culture du maïs vers -2500. Encore une fois, impossible de vous en dire tellement plus, surtout que ces périodes ne concernent absolument pas la mythologie maya. Voilà pourquoi je préfère les survoler. Une chose est certaine : à cette époque, nous ne pouvons pas encore parlé de civilisation maya à proprement dit.

-7000 : vie sédentaire progressive.

-3400/-2300 : apparition des premiers hameaux semi-permanents.

-2500 : développement de la culture du maïs.

LA PÉRIODE PRÉ-CLASSIQUE (-2000/+250)
La période pré-classique nous est mal connue, notamment le pré-classique ancien et moyen. Au pré-classique moyen, nous constatons des constructions plus monumentales. Il faut également noter un développement sur les ruines de la civilisation olmèque, et donc une influence forcément olmèque. Car il ne faut pas oublier une chose : les premiers mayas des Basses-Terres centrales sont contemporains des derniers Olmèques ! L'influence sur ces derniers est donc indéniable.

La dernière partie du pré-classique (pré-classique récent) nous montre un développement commun entre les Basses-Terres et les Hautes-Terres :
  • Édification de monuments monumentaux.
  • Épanouissement culturel.
  • Période d'expansion.
  • États gouvernés par des rois divinisés.
  • Agglomérations bien peuplées.
LA PÉRIODE CLASSIQUE (+250/+950)
La période classique est celle que nous connaissons le mieux aujourd'hui : c'est l'époque des stèles, de l'utilisation du compte long, de l'écriture hiéroglyphique, de la voûte en encorbellement ! On sait notamment qu'on assiste à une intensification du commerce entre les Hautes Terres et les Basses Terres, que de grandes cités que l'on qualifiera de "super-états" verront le jour, que le peuplement de ces territoires va s'intensifier, et que la fin de cette période correspond à l'abandon progressive des cités des Basses-Terres. Il faut bien comprendre que la période classique est pour les Basses-Terres un temps d'instabilité, avec une expansion ou reflux des sphères de domination et la naissance d'états rivaux. Un problème majeur subsiste : pas d'union politique, mais plutôt une mosaïque changeante !

292 : plus ancienne date enregistrée sur un monument maya (sur la stèle 29 de Tikal).

378 : Tikal est conquise par une expédition de Teotihuacan. Yax Nuun Ayiin ("Premier crocodile") accède alors au trône de Tikal. Son fils Siyaj Chan K'awiil II ("Ciel de tempête") participera à la grandeur de Tikal à travers de nombreuses conquêtes et des alliances.

411 : début du règne de Siyaj Chan K'awiil II (411-456) à Tikal.

426 : K'inich Yax K'uk' Mo' fonde une nouvelle dynastie à Copan.

Le VIe siècle voit l'émergence de Calakmul, la fameuse cité rivale de Tikal. La confrontation entre les deux cités (et leurs alliés respectifs) va durer jusqu'au VIIe siècle (voir même début VIIIe siècle) !

562 : Attaque contre le centre même de Tikal.

572 : Tikal est mise à sac par Caracol et son allié Calakmul.

572-692 : Période de tribulation politique à Tikal ; la ville va tomber dans l'oubli.

Le Classique récent (600/830) voit naître une concurrence maya entre les cités, ainsi qu'une nette influence étrangère sur toutes les Basses Terres (influence mexicaine mais aussi échanges). Cela est accompagné par une forte expansion économique et un épanouissement politique, permettant ainsi à la civilisation maya des Basses-Terres d'atteindre son apogée (on peut alors parler d'âge d'or des mayas des Basses-Terres). Des villes comme Tikal prospère et instaure une domination politique régionale dès le IVe siècle, mais comme il est coutume dans l'histoire maya, une rivale dénommée Calakmul va tout détruire au VIe siècle. S'en suivra alors une période de déclin de 150 ans avant que Tikal ne renaisse de ses cendres (562-692). C'est également une période où la ville de Palenque atteindra elle aussi son apogée.

625 : Début du règne de K'inich Janaab' Pacal Ier dit Pacal de Grand (603-683) à Palenque.

650 : Teotihuacan est dévastée par un incendie. La "cité des dieux" survivra encore un siècle, puis s'effondrera vers 750-800. Bien sûr, nous ne sommes pas dans le cadre du monde maya, je le sais parfaitement, mais cela reste une donnée importante.

657 : Calakmul (et son allié Caracol) bat Tikal.

679 : Victoire de Calakmul à Dos Pilas, sur la cité de Tikal.  Bizarrement, on assiste alors à un déclin de Calakmul qui constraste avec la prospérité nouvelle de Tikal. Les rapports de force ont changé !

680 : Tikal triomphe de Caracol, alliée de Calakmul.

La fin du VIIe siècle et le VIIIe siècle voit la renaissance de la grande Tikal.

682 : Début du règne de Jasaw Chan K'awiil (682-734), un des plus grands dirigeants de la cité de Tikal, qui va activement participer à la renaissance de sa cité. Lui succèdera son fils Yik'in Chan K'awiil, qui sera celui qui amènera Tikal sans sa période la plus prospère et expansionniste.

683 : Mort du roi Pacal le Grand. Son fils Chan Bahlum II (dit Serpent Jaguar II) lui succède.

684/692 : Règne à Palenque du roi Chan Bahlum II (635-702), fils de Pacal, qui fait construire les trois édifices les plus emblématiques de la cité : le temple de la Croix, le temple du Soleil et le temple de la Croix Feuillue. Un de ses autres hauts faits sera la mise à sac de la ville de Tonina.

695 : Tikal (plus précisément le souverain Jasaw Chan K'awiil) capture le roi "Patte de Jaguar" de Calakmul et triomphe sur sa cité rivale ! La revanche est assouvie ! La même année, Waxaklajuun Ub'aah K'awiil (alias 18 Lapin) accède au trône de Copan.

737 : capture du souverain de Copan, "Lapin XVIII" (18 Lapin - Son vrai nom étant Waxaklajuun Ub'aah K'awiil) par le souverain de Quirigua. Il est très certainement sacrifié et cet acte symbolise la victoire de Quirigua sur Copan.

750-800 : Abandon progressif de Copan.

763 : début du règne du dernier souverain maya de Copan, appelé Soleil levant (763-800).

800-950 : Émergence de la ville de Chichen Itza au premier plan par les Toltèques.

869 : Date de la dernière date notée sur une stèle de Tikal.

Vers 800, on voit dans les Basses Terres centrales une phase de déclin après un fort développement. Ainsi, les cités-états de ce territoires vont s'éteindre une par une. Mais dans le Yucatán, on assiste au contraire à une évolution de nombreuses cités, comme Mayapan, Uxmal, Copan, Palenque, Chichen Itza ou encore Labna, la péninsule connaissant ainsi son apogée ! Il faut donc bien comprendre qu'au 9e et 10e siècle (donc à la fin de la période classique), beaucoup de cités des Basses Terres vont être abandonnées peu à peu (effondrement de nombreux royaumes). Malgré tout, ne croyez pas que la civilisation maya a alors disparu, elle va juste subir des transformations au 10e et 11e siècle.

Il n'y a qu'à faire le comparatif du nombre de cités mayas qui ont érigé des monuments datés à chaque fin d'un katun (donc tous les 20 ans) :
  • 9.18.0.0.0 (soit 790 de notre ère) : 19 cités mayas.
  • 9.19.0.0.0 (soit 810) : 12 cités mayas.
  • 10.0.0.0.0 (soit 830) : 3 cités mayas.
  • 10.4.0.0.0 (soit 909) : 2 cités mayas (Quintana Roo et Tonina).
Cela est très représentatif de cette phase de déclin...


Entre 800 et 950, les Itzas quittent Chacanputun sur la côte sud-ouest pour fonder une petite ville dédiée au culte du puits sacré dans le Yucatán. Les Toltèques arrivent alors à Chichen Itza pour en faire une nouvelle capitale, et vont l'enrichir d'édifices majestueux. Malgré tout, cela n'empêchera pas sa chute par sa grande rivale : Mayapan.

On arrête conventionnellement la période classique en 950, mais vous pourrez trouver la date de 900 ou encore de 1000. Disons qu'il s'agit là d'un compromis cohérent.

LA PÉRIODE POST-CLASSIQUE (950/1511)
La fin de la période classique (à partir de 750) signe l'effondrement des Basses-Terres méridionales. Paradoxalement, on assiste à un épanouissement culturel dans les Basses-Terres septentrionales (Nord) au point de pouvoir parler d'apogée du Yucatán, ainsi que dans les Hautes-Terres. Chichen Itza devient entre 1000 et 1050 la puissance principale du Yucatán Septentrionale, suite à l'invasion des Toltèques dans le Yucatán. C'est donc une période de transition et de transformation. Comprenez bien que le déclin culturel s'est étalé sur un siècle pour une pluralité de facteurs : il ne s'agit donc pas d'un effondrement brutal dû (uniquement) à une éruption volcanique ou encore une famine !

La ligue de Mayapan ("Drapeau des Mayas") regroupant Chichen Itza (Itza), Uxmal, les Tutul-Xiu et Mayapan (familles des Cocoms).

1000-1050 : Chichen Itza devient un site majeur des Basses-Terres, développée par les Toltèques.

1007 : création de la ligue de Mayapan par le souverain Ah Mekat Tutul Xiu. Il arrive à unifier Chichen Itza, Mayapan et Uxmal. Cette alliance va dominer le Yucatan jusqu'à la moitié du XVe siècle !

1194 : Hunac Ceel Cauich revendique le pouvoir divin et tente de réformer le gouvernement. S'en suit une guerre entre Chichen Itza et Mayapan, qui aboutira à la victoire de Mayapan et une domination de la cité sur la région pendant plus de deux siècles.

La ligue de Mayapan à son apogée, autour de 1200

1441 : révolte de Xiu Ah Xupan, souverain de Uxmal, contre la famille royale des Kocoms. C'est la fin de la ligue de Mayapan, qui sombre dans le Chaos. 16 états mayas émergent à la suite de cette révolte pendant les années 1441-1461. On assiste donc à un morcellement politique, avec une série de royaume combattants.


1461 : La ligue de Mayapan est complètement désintégrée.

1500-1520 : période selon laquelle aurait vécu le prophète Chilam Balam, dans la ville de Mani.

1502 : premier contact entre les mayas et les espagnols.

LA  CONQUÊTE ESPAGNOLE (1511-1542)
Autant vous le dire tout de suite : la conquête espagnole a été certes tardive, mais féroce, et dans les deux camps. Là où l'Empire aztèque a plié en à peine une année, il en faudra vingt aux espagnols pour conquérir rien que la péninsule du Yucatán ! Je n'ai d'ailleurs pas pu résister à l'envie de vous noter le petit surnom que les Mayas donnaient aux espagnols : "renards hypocrites". Quant à ces derniers, ils avaient également leur petit surnom pour désigner les indiens : "indios tontos" ("crétins indiens").  Ahhhh... Ca sent l'amour fou entre ces deux peuples :)

Et pour illustrer cette belle amitié, un petit extrait du Chilam Balam de Chumayel, qui permet de voir la réaction des Mayas du Yucatán devant l'arrivée des conquistadors espagnols, qu'ils appellent les Dzules ("Étrangers") : "La lune, le vent, l'année, le jour : tout chemine mais passe aussi. Tout sang aboutit à l'endroit de son repos, de même que tout pouvoir parvient à son trône... (Mais) survinrent les Dzules qui bouleversèrent tout. Ils enseignèrent la crainte , ils flétrirent les fleurs, suçant jusqu'à tuer la fleur des autres afin que pût survivre la leur... Il n'y avait chez eux ni grande sagesse, ni parole, ni enseignement... Les Dzules n'étaient venus que pour châtrer le Soleil ! Et les fils de leur fils sont restés parmi nous qui ne recevons d'eux qu'amertume."

Inutile de vous rappeler que le début de la colonisation du "Nouveau-Monde" a commencé lors de la conquête de Cuba et de Hispaniola (actuel Haïti) par Christophe Colomb dès 1492-1493. Ce dernier pense alors que Cuba est un bout de l'Asie, et croira obstinément avoir atteint le Japon (Cipango) et la Chine (Cathay) une grande partie de sa vie, là où un certain Amerigo Vespucci parle déjà de "Nouveau Monde" ! Les années 1492-1507 sont des années décisives, où de nombreuses découvertes en terme d'exploration vont avoir lieu. La conquête du territoire maya intervient donc assez tardivement, à un moment où les espagnols sont déjà bien implantés dans les Caraïbes, et quelques années après la destruction de l'empire Aztèque. C'était la minute "piqure de rappel pour mieux comprendre ce qui va suivre".


1511 : un navire espagnol parti de Cuba fait naufrage (en raison d'une tempête) dans la mer des Caraïbes, vers le Yucatán, avec à son bord 15 hommes et 2 femmes. Il y aura 11 survivants, qui seront tous capturés, réduits en esclavage puis sacrifiés par les mayas, sauf deux épargnés : Gonzalo Guerrero (1470-1536) et Geronimo de Aguilar (1489-1531). Le premier va s'intégrer à une tribu indienne, se marier avec la femme du cacique et avoir trois enfants d'elle ; l'autre être réduit en esclavage par un cacique. Quand il sera retrouvé par Hernan Cortes (1485-1547) en 1519, Gonzalo Guerrero refusera de réintégrer la vie européenne, et même pire, défendra sa tribu contre les espagnols ! Geronimo de Aguilar, lui, sera par la suite d'une aide précieuse à Hernan comme traducteur, ayant appris le maya pendant ses années de captivité.

1517 : Hernandez de Cordoba (1475-1517) est envoyé en expédition par Diego Velazquez de Cuéllar (1465-1524), gouverneur de Cuba. Il est bien sûr à la recherche d'or et d'esclaves... Voilà qu'il débarque sur une île tout proche de côte nord-est du Yucatán, qu'il appelle "l'île des femmes" (isla mujeres). Puis il poursuit la côte jusqu'à Chakan Putum (Champoton), où il est férocement attaqué par les mayas locaux, au point de subir 33 blessures lors d'une bataille ! Il doit alors retourner à Cuba pour se soigner, mais il mourra de ses blessures. C'est le premier échec dans la conquête espagnole.

1518 : Diego Velazquez de Cuellar arme 4 bateaux et 200 hommes pour une seconde expédition, sous le commandement d'un certain Juan de Grijalva (1490-1527). Ce dernier retournera à Chakan Putum et y mènera une autre bataille qui tournera cette fois-ci à son avantage. Il débarque également à Tulum, qui est encore habitée à ce moment-là.

1519 : Hernan Cortes (1485-1547) est de passage ! Il débarque à Cozumel avec 11 bateaux, 508 hommes et 16 chevaux, et apprend que deux rescapés espagnols sont captifs des mayas. Il finit par récupérer au final Geronimo de Aguilar, mais pas Gonzalo Guerrero, qui refuse de partir et prend part activement à la résistance !! En mars 1519 est livrée la bataille de Centla contre les Chontales dirigés par un certain Taabscoob. Cette dernière voit la victoire des troupes espagnoles. Cortes s'installe ensuite à Veracruz et se détourne vers l'Empire aztèque, qui l'occupera jusqu'en 1521. Il a avec lui deux traducteurs qui joueront un rôle primordial dans la destruction de l'empire aztèque : Geronimo de Aguilar et une jeune femme connue sous le nom de la Malinche (la fameuse maîtresse de Cortes), qui maîtrise le nahuatl, le maya et le castillan !

1521 : une épidémie de variole finit par emporter le tiers de la population des Hautes Terres du Guatemala ! La cause ? À votre avis... Pour info, la même année, Cortes soumet l'empire aztèque de Moctezuma II.

1523 : c'est le début de la conquête du Yucatan, qui s'achèvera près de 25 ans après (1523-1547). Les principales tribus du Yucatán sont à ce moment-là  les Xius, les Cocoms, les Chels, les Cupuls, les Canuls et les Chontals. De solides rivalités sont installées entre toutes ces cités. Et devinez qui revient s'intéresser aux territoires mayas ? Un certain Hernan Cortes, qui a deux ans auparavant fait plié l'Empire aztèque !

1524-1527 : conquête des Hautes Terres, principalement représentées par les Quichés et les Cakchiquels, mais également par les Mam ou encore les Pokomam.

1524 : guerre du royaume de Q'umarkaj. Les espagnols s'allient avec les Cakchiquels, alors en guerre contre les Quichés. Pedro de Alvarado (1485-1541) est envoyé avec 600 hommes contre le royaume de Q'umarkaj. Soutenu par les Cakchiquels, il finit par rentrer dans Q'umarkaj et capturer le roi Vahxaqui-Caam, ainsi que les nobles Quichés. Ils finissent tous brûlés vifs. Puis Pedro détruit également Chuitinamit, capitale des Mayas Tzutuhil, avant de trahir les Cakchiquels et de détruire leur capitale Iximché. Vive l'honneur !!

1525 : Cortes traverse le sud du pays maya, du Tabasco au Honduras. Tayasal est une de ses étapes.

1526 : le roi d'Espagne accorde à Francisco de Montero le droit de prendre possession du Yucatán.

1527 : Francisco de Montero (1479-1548) échoue dans sa tentative de conquête du Yucatán par l'est (première campagne de 1525 à 1527). Il doit notamment battre en retraite lors de la sanglante bataille de Chauac Ha, défait par les mayas Cupules. La première tentative se solde donc par un échec.

1530 : deuxième campagne de Montero (1530-1535). Les Cupules attaquent une coalition des espagnols avec les mayas Cheles : les deux alliés essuient alors de lourdes pertes (150 tués espagnols !). Cela sonne une nouvelle fois comme un échec, surtout après l'abandon en 1535 de beaucoup de ses soldats qui préférèrent se rendre au Pérou où l'on parlait alors de "richesses nouvelles". Une vraie galère cette conquête du Yucatán !

1532 : Alonso de Avila (1486-1542) est chassé de la région de Chactemal par les mayas. Un certain Gonzalo Guerrero aurait été l'instigateur de la résistance (vous vous rappelez de lui ? L'espagnol devenu cacique !!).

1535 : débarquement des premiers franciscains selon le souhait de la reine d'Espagne de venir en aide à Montero. Ces derniers vont alors commencer leur travail zélé de destructions d'idoles et d'interdictions de manifestations en tout genre. Le meilleur exemple de ce fanatisme religieux reste celui de Diego de Landa (1524-1579), ethnographe et inquisiteur zélé, qui va se relever être notre meilleur chroniqueur du monde maya tout en se targuant d'une réputation particulièrement horrible et destructrice vis à vis des mayas.

1540-1546 : conquête d'une grande partie du Yucatán.

1541 : début du Christianisme en terre maya.

1542 : Montero soumet les mayas et fonde la ville de Merida sur les ruines de l'ancienne coté de Tihoo.

1546 : soumission de Tutul Xiu et conversion à la foi chrétienne. Tutul Xiu était le plus puissant chef de la province de Mani, au nord du Yucatán (voir carte juste en-dessous). Répression la même année de la grande révolte maya. 

1547 : la conquête du Yucatán est complète. Malgré tout, il restera de vastes secteurs insoumis et des révoltes seront fréquentes jusqu'au 19e siècle ! De vrais rebelles ces Mayas !!

1562 : autodafé de Mani du 18 Aout. Diego de Landa se targue alors d'avoir détruit 27 codices, 13 autels de pierre de grande taille, 22 pierres de petite taille, 197 vases peints et 5000 idoles !! Pour toutes ses destructions et ses tortures pratiquées sur les indiens, son supérieur le renvoie dès 1563 en Espagne afin d'être jugé.

1566 : Diego de Landa achève sa Relation des choses du Yucatan. Il s'agit aujourd'hui de notre plus complète source d'informations sur les mayas.

1572 : Diego de Landa est élu évêque du Yucatan ! Le retour du fou à lier !

1618 : deux franciscains arrivent à Tayasal. Ils ont bien reçus, mais les Itzas refusent de se convertir à la foi chrétienne.

1622 : première guerre du Tayasal (1622-1624). Le père Delgado arrive à Tayasal, dans la région du lac de Peten Itza, avec 80 indiens convertis. Mal lui en a pris, puisqu'ils sont alors tous sacrifiés sur le champ par les Itzas (le père religieux inclus) !!

1624 : seconde tentative d'annexion de l'état Itza, qui se solde par une défaite cuisante des espagnols. Le gouverneur renonce alors à l'invasion.

1696 : la ville des Itzas, gouvernée par Kan Ek', est finalement prise par les espagnols de Martin de Ursua (1653-1715) le 13 mars 1696, plus de 70 ans après les premières tentatives d'invasion !!

LA COLONISATION ESPAGNOLE (1542-1847)
Je ne m'attarderai pas sur cette partie post-conquête, qui voit alors le territoire maya colonisé par les espagnols pendant près de trois siècle. Mais ne croyez pas qu'il s'agira de trois siècles tranquilles : bien au contraire, des poches de résistance subsisteront toujours.


1847-1861 : Guerre des castes (ou Guerre des couleurs). Le sud du Yucatán prend son indépendance et devient le territoire autonome du Quintana Roo (gouvernement maya).

1972 : Le Quintana Roo devient un état de la République Mexicaine.