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mercredi 14 octobre 2015

MYTHOLOGIE MÉSOPOTAMIENNE - LA COSMOGONIE


La mythologie mésopotamienne propose une cosmogonie plus passionnante qu'il n'y parait. Mais je tiens à être clair dès le départ : des cosmogonies, il y en a plusieurs, trois pour être plus précis. En effet, le mythe de la création est d'origine sumérienne, bien qu'il n'y ait à proprement dit aucun mythe sumérien à ce sujet (juste différentes allusions dans des textes). Elle est...comment dire ? Compliquée, incohérente et vraiment bof bof. Heureusement, elle a été plus tard reprise, modifiée et agrémentée, dans ce que nous appelons la cosmogonie babylonienne. C'est celle-là qui m'intéresse ! Car elle se base sur la version sumérienne, mais demeure plus complète, mieux structurée et vraiment plus homogène. Et surtout, elle est racontée dans l'Épopée de la création (l'Enuma Elish), un récit composée de sept tablettes, presque complet (seule une grosse partie de la cinquième tablette nous manque). Sachez qu'une version assyrienne sera rédigée plus tard, Assur tenant le rôle de Mardouk.

Résumé des différentes cosmogonies mésopotamiennes :
  • Cosmogonie sumérienne,
  • Cosmogonie babylonienne (l'Enuma Elish),
  • Cosmogonie assyrienne.
Retenez donc bien qu'il existe plusieurs cosmogonies en Mésopotamie, mais que l'Enuma Elish est la mise en œuvre la plus achevée des conceptions mésopotamiennes en matière de cosmologie.

Entrons dans le vif du sujet...


Enuma Elish veut dire "Lorsqu'en haut" tout simplement parce que le récit commence par ces mots. Ce poème est quasiment complet et a été composé probablement à la fin du 12e siècle avant JC, au cours du règne d'un dénommé Nabuchodonosor Ier [1124-1103 av JC] (vous connaissez son nom si vous avez lu mon introduction, ce qui vous permet de mieux visualiser dans quel contexte le texte a été écrit). Ce récit célèbre la gloire du dieu Mardouk et raconte son ascension vers la souveraineté du panthéon babylonien. Entendez donc bien qu'à Babylone et à cette époque, Mardouk est le dieu principal. Mais cela ne sera pas toujours le cas selon les dates et les peuples mésopotamiens. Il s'agit donc d'un poème célébrant le triomphe de Mardouk au sein du panthéon mésopotamien.

Ce poème est composé d'environ 994 lignes et divisé en 7 sections, qui correspond à une tablette d'argile par section. Il est désormais aisé de trouver une version française du texte intégral, mais j'en reviens toujours au livre de Jean Bottéro "Lorsque les dieux faisaient l'homme" ! Quel ouvrage ! Sinon, signalons l'ouvrage de Jean Kardec "Enuma Elish : L'Épopée de la Création", la traduction de Philippe Talon "Enuma Elis, lorsqu'en haut", ou encore celle de Louis Galador, "Enuma Elish : La genèse babylonienne". Bref, il y a de quoi faire !

Ce texte cosmogonique a été extrait des ruines de la bibliothèque d'Assurbanipal à Ninive, en 1849, par Austen Henry Layard (1817-1894). Publié pour la première fois en 1876 par Georges Smith dans son The Chaldean Account of Genesis, il est écrit en akkadien sur 7 tablettes d'argile, et demeure une copie d'une version plus ancienne encore. D'autres exemplaires ont été découvert par la suite à Kish ou encore Assur, ce qui a permis de compléter certaines zones manquantes.

Voilà ! Niveau présentation, je pense que nous sommes OK. Passons maintenant au contenu en lui-même !

L'ÉPOPÉE DE LA CRÉATION 
(L'ENUMA ELISH)

Tout d'abord, voyons un peu la structure du récit :
  • Tablette I : Naissance des dieux et mort d'Apsu.
  • Tablette II : La conjuration.
  • Tablette III : La débandade.
  • Tablette IV : Le triomphe de Marduk.
  • Tablette V : L'arrangement de la Terre et des cieux.
  • Tablette VI : L'avènement de l'humanité et les 50 noms de Marduk.
  • Tablette VII : Les 50 noms de Marduk (suite).
Mais que nous apprend ce récit sur la création de l'Univers ? Voyons voir cela à travers quelques tranches du texte choisis par moi-même.

"Lorsqu'en haut le ciel n'avait pas encore de nom
Et qu'ici-bas la terre ferme n'avait pas de nom
Il y avait Apsou, le premier d'entre tous, le progéniteur
Et Tiamat, la génitrice, qui les enfantera tous"

On note donc deux entités primordiales : APSOU et TIAMAT ("Mère de la Vie" en sumérien). Le premier représente les eaux douces, l'autre les eaux salées. Ils vont mêler leurs eaux ensemble, créant ainsi une première génération de dieux :

"Alors d'Apsou et de Tiamat, dans la vase précipitée, Lahmu et Lahamu ont émergé et leurs noms furent prononcés. A peine grandis, Anshar et Kishar leurs sont nés, les surpassant. Le ciel et la terre se sont écartés..."

Jusque là, rien de bien compliqué. On rajoute LAHMU et LAHAMU, qui représente la première génération de dieux (et qui symbolisent les étoiles ainsi que les constellations), puis leurs enfants ANSHAR ("Ciel universel" ou "Tout ce qui se trouve au-dessus") et KISHAR ("Terre universelle" ou "Tout ce qui se trouve en-dessous"), qui forment la deuxième génération.

"Anshar fit son fils Anu pareil à lui-même, et Anu a engendré Nudimmud (Enki/Ea) pareil à lui-même. Ea était supérieur à ses ancêtres [...], plus puissant encore qu'Anshar."

Première difficulté. Bon, Anshar et Kishar créent ANU, et Anu engendre ENKI ("Seigneur de la terre"). Facile à noter. Mais avec qui Anu a-t-il fait Enki ? Il y a toujours une entité féminine dans la mythologie mésopotamienne, mais dans ce texte, rien n'est dit. Dans mes recherches, sa mère serait NAMMU, mais cette dernière serait assimilée à Tiamat dans la cosmogonie sumérienne (O_o Arg !). En plus, Anu aurait eu plusieurs femmes car on lui rajoute ANTU, KI, URAS et même parfois ISHTAR ! Peu importe, je sais, mais tout n'est pas clair déjà. Poursuivons...
Finalement Anu engendre une série de dieux, les Anunnakis, qui viennent à faire trop de bruit en se disputant et en dansant constamment "dans le ventre de Tiamat", empêchant Apsou de se reposer.

"Ils secouaient le ciel avec leurs danses. Apsou est excédé par le bruit, pas Tiamat qui supporte mieux leur agitation. Apsou finit par appeler son vizir Mummu, des nuages, et lui dit : Leurs nuisances me sont devenues insupportables, je ne peux pas me reposer le jour, ni la nuit [...] Je les supprimerai et les disperserai ! Ainsi nous aurons la paix et nous pourrons dormir"

"Mais Tiamat est irritée par son comportement : Pourquoi devons-nous détruire les enfants que nous avons faits ?"

"Alors Mummu parla : Père, détruisons ces rebelles. Vous aurez le silence pendant la journée, et la nuit vous dormirez"


"Quand Apsou entendit cela, il a étreint Mummu, son visage s'est allumé de cruauté et il a décidé la destruction des dieux ses fils"


L'histoire se met en place peu à peu. On notera juste l'apparition de MUMMU, le vizir d'Apsou, qui est un des Anunnakis. Mais Enki apprend les intentions d'Apsou et échafaude un plan pour le contrer.

"Il a versé le sommeil sur Apsou de sorte qu'il dorme profondément. Apsou s'est endormi, les eaux douces se sont endormies"

"Il a lié et tué Apsou [durant son sommeil]. Il a attaché Mummu et lui a passé une corde au nez"


"Après avoir vaincu et massacré ses ennemis, Ea a poussé un cri triomphal au-dessus d'eux"


Enki tue Apsou et fait prisonnier Mummu ! Ça chauffe ! Il prend ensuite possession des eaux de l'Apsou et y fonde son temple, ainsi que sa résidence, où il vit avec son épouse DAMKINA. Il devient alors le maître des eaux souterraines, souverain du monde d'en-bas : l'APSU.

"Dans la chambre des Destins, le plus intelligent des dieux a été engendré [...] Mardouk a été crée. Son père Ea l'a engendré, Damkina, sa mère, l'a allaité."

"Anu l'a vu, et s'est réjoui ; son cœur a été rempli de joie."


"Anu a crée les quatre vents et les a mis dans la main de Mardouk."


Tout est ici bien expliqué. MARDOUK a donc pour père Ea, pour mère Damkina, et pour grand-père Anu. Tout est beau, tout est mignon, oui mais...

"Mais les autres dieux n'ont alors plus eu aucun repos, tourmentés par les orages de Mardouk [...] Ils s'approchèrent de Tiamat et lui dit : Ils ont tué Apsou, votre conjoint, et vous n'avez pas bougé."

"Réveillez-vous, notre mère ! Vengez-vous et rendez-les aussi vides que le vent."


"Ils grondaient et s'accumulaient ainsi autour de Tiamat, jusqu'à ce que celle-ci décida de modeler des armes pour ces dieux."


Bon, il est sympa grand-père Anu, mais il a foutu la merde a remettre un jouet aussi bruyant à son petit-fils ! Une partie des Anunnakis se soulèvent et font culpabiliser Tiamat qui finit par céder, guidée par sa soif de vengeance. À noter que Tiamat est appelé dans le réçit à ce moment-là UMMU-HUBUR ("mère de l'Abime" ou "mère du fleuve").

"Nous ferons des monstres, et les monstres et les dieux marcheront dans la bataille contre eux."

"La vieille sorcière, la première mère, enfanta alors une nouvelle couvée."


"Elle a engendré d'énormes serpents aux crochets empoisonnés, et des dragons grondant comme des dieux."


Tiamat engendre 11 monstres (vous pourrez avoir leurs noms dans le texte) et nomme KINGU général de l'armée. Ce Kingu est son fils, mais aussi son époux O_O arg ! Cougar et incestueuse !

"Elle exalta Kingu et le constitua comme leur chef pour diriger la troupe, pour mener les armées et déclencher l'attaque."

"Tu es magnifique, mon époux !"


"Elle lui donna les Tablettes du Destin et les fixa à son cou [...] Ainsi Kingu a reçu l'autorité alors qu'elle appartenait avant à Anu."


"Les mauvaises nouvelles parvinrent à Ea [...] Alors il s'est tournée vers les autres dieux. Il est allé voir Anshar, le père de son père, et lui a dit ce que Tiamat avait décidé."


"Elle a dressé autour d'elle et contre nous les terribles Anunnakis que vous avez engendré. Elle a opposé la moitié des dieux contre l'autre moitié."


Kingu est le général de l'armée de Tiamat, cela est bien clair. Il a d'ailleurs les fameuses Tablettes du Destin sur lui. Encore une fois, Enki est mis au courant, ce qui est plutôt cohérent, lui que l'on appelle "celui qui entend tout"

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Marduk tue Tiamat (puis les 11 monstres et Kingu) et se sert de son corps pour façonner le monde :

    • Ses boyaux deviennent xxx
    • Sa salive créée les nuages,
    • Sa tête se mue en volcan,
    • Ses yeux deviennent le Tigre et l'Euphrate.
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Du sang de Kingu, Ea créé l'homme.