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jeudi 18 août 2016

MYTHOLOGIE MÉSOPOTAMIENNE - LES TEXTES


Laissez-moi faire un parallèle historique des plus saisissants : alors que les Incas au 16e siècle de notre ère ne disposaient toujours pas d'une écriture à proprement parler (qu'on ne vienne pas me dire que les quipus étaient une forme d'écriture, les Incas n'ont jamais développé une littérature avec des nœuds en dernière nouvelle), les Mésopotamiens sont considérés comme les inventeurs de l'écriture, avec ce que l'on appelle aujourd'hui l'écriture cunéiforme. Elle aurait été mise au point entre -3400 et -3200 av JC (si si, vous lisez bien) ! Et comme l'archéologie a fait des miracles en ce qui concerne cette civilisation, nous disposons aujourd'hui de milliers de tablettes d'argile gravées, qui nous ont laissé une multitude d'informations, dont plusieurs textes (mythologiques, administratifs,...) fort intéressants.

J'ai cherché longtemps comment remplir correctement cette section sans être redondant dans l'information. L'Enuma Elish, le plus grand texte cosmogonique, est analysé dans la section La cosmogonie mésopotamienne. Une grande partie des autres mythes sont décrits dans la section Les mythes mésopotamiens. Alors que nous reste-il pour remplir cette section ? Bah tout simplement les textes non mythologiques et la grande épopée que constitue celle de Gilgamesh :)


Ce serait un sacrilège de ne pas parler de deux textes en particulier, complètement différents, comme vous allez le voir. D'un coté, nous avons le Code de Hammurabi, le premier texte de lois connu qui nous soit arrivé, rédigé sous le règne de Hammurabi vers -1750 et actuellement conservé au Musée du Louvre. Nous disposons fort logiquement d'une traduction complète en français, donc autant ne pas s'en priver. Le deuxième texte est un chef d'œuvre de littérature, l'Épopée de Gilgamesh, que l'on peut mettre au niveau de l'Odyssée de Homère ou du Livre de Rois de Ferdowsi. Encore une fois, plusieurs traductions françaises excellentes sont disponibles, notamment celle de Jean Bottéro. Avec ces deux textes, je pense pouvoir remplir honorablement cette section ; je finirai avec quelques textes plus courts mais dont l'intérêt n'en ai pas moins conséquent.

L'ÉPOPÉE DE GILGAMESH
Autant être très clair avec vous : ne pas connaître ce texte est pour moi une infamie qu'il vous faut dès à présent réparer (si cela est bien le cas). Car il s'agit là de la toute première épopée de l'Histoire, un texte qui était déjà largement diffusé à son époque et qui était traduit notamment en Hittite et en Hourrite (en plus d'être connu à Assour ou encore en Palestine). Retenez-bien cela : il s'agit là du plus vieux texte de l'humanité, 1000 ans antérieur à l'Iliade et  l'Odyssée, plus de 2000 ans antérieur à la Bible !! Est-ce que vous vous rendez compte ?

Cette épopée met en scène le célèbre héros Gilgamesh ("le guerrier qui est en avant" en akkadien), cinquième roi (mi-légendaire) de la première dynastie d'Uruk d'après La liste royale sumérienne, qui aurait régné vers -2650 durant 126 ans ! Fils de Lulla, un roi-prêtre de Koullab (ou du dieu Lougalbanda selon les versions) et de la déesse Ninsoun (La vache céleste), il s'agit donc d'un demi-dieu, qui a accompli des hauts faits au point d'être divinisé. Il est notamment le bâtisseur des murailles d'Uruk, de l'Eanna (le temple d'Anu et d'Ishtar), et son fils se prénomme Our-Noungal, sixième roi d'Uruk. Avouez que rien que cela vous donne envie ! :)

"Pour deux tiers, il est dieu, pour un tiers il est homme"

Concrètement, le texte dit standard est développé sur 11 tablettes, auquel une douzième (bien plus tardive et tirée d'un poème sumérien) est rajoutée sans qu'elle suive le reste du texte : il s'agit de La descente aux enfers de Gilgamesh (ou Gilgamesh, Enkidu et le séjour des morts). Onze ou douze tablettes, à vous de trancher ! Trouvées dans les fouilles de la bibliothèque du roi Assurbanipal à Ninive, c'est un certain Georges Smith (1840-1876) qui traduit pour la première fois l'épopée de Gilgamesh (c'est lui qui trouve la fameuse tablette 11 de l'épopée le 2 décembre 1872, qui fera tant de bruit), et le texte dans son ensemble est divisé comme suit, pour environ 3000 lignes :

Tablette 01 : La présentation de Gilgamesh et d'Enkidu.
Tablette 02 : La rencontre entre Gilgamesh et Enkidu.
Tablette 03 : La décision d'aller combattre Humbaba : les préparatifs et le départ.
Tablette 04 : Le voyage vers la forêt des Cèdres.
Tablette 05 : Le combat contre Humbaba, gardien de la forêt des Cèdres.
Tablette 06 : Le combat contre le taureau céleste.
Tablette 07 : Les lamentations d'Enkidu ; l'Agonie.
Tablette 08 : La mort et les funérailles d'Enkidu.
Tablette 09 : Gilgamesh part à la recherche de l'immortalité.
Tablette 10 : Rencontre de Gilgamesh avec Siduri, Urshanabi et Utanapishtim.
Tablette 11 : Récit du Déluge ; Échec de Gilgamesh et retour à la vie ordinaire.
Tablette 12 : Gilgamesh, Enkidu et le séjour des morts. Tablette rajoutée vers -700.

Retenez donc bien que la version dite "classique" provient des fouilles de Ninive, auquel il a été intégré d'autres version plus anciennes pour combler les manques. Le tout nous offre une épopée vraiment formidable !

Nous voyons clairement qu'il se distinguent deux grand cycles, que j'ai nommé ainsi :
01. Le cycle héroïque (Tablettes 01 à 08).
02. Le cycle de l'immortalité (Tablettes 09 à 11).
Deux cycles pour deux Gilgamesh bien différents.
Mon but n'est pas ici de vous détailler le texte (et donc de vous mâcher tout le boulot), mais de vous faire un résumé concis et efficace, qui doit vous donner envie d'aller acheter dans sa meilleure version et de le dévorer. Si cela arrive, alors j'aurai réussi mon défi.

I. LA CRÉATION DE GILGAMESH ET D'ENKIDU
Tablette #01

"Celui qui a tout vu
celui qui a vu les confins du pays
le sage, l'omniscient
qui a connu toutes choses
celui qui a connu les secrets
et dévoilé ce qui était caché
nous a transmis un savoir
d'avant le déluge.

Il a fait un long chemin.

De retour, fatigué mais serein,
il grava sur la pierre
le récit de son voyage.
Il bâtit les remparts d'Ourouk
et l'Éanna sacré, pur sanctuaire
demeure d'Anou et d'Ishtar."

Voici comment est présenté Gilgamesh dans le prologue de l'Épopée. À la fois dieu et homme, Gilgamesh aurait été créé par les dieux (notamment par la déesse Aruru), et doté d'une force extraordinaire.

"Après que Gilgamesh eut été créé par les grands dieux
Shamash lui accorda la beauté
et Adad la vaillance.
Pour dieux tiers il est dieu
pour un tiers il est homme."

"C'est Arourou qui créa Gilgamesh semblable à un taureau sauvage.

Sa force est incomparable
ses armes sont invincibles."

Nous ne pouvons être plus clair. Hélas, Gilgamesh fait régner la terreur dans sa cité d'Uruk, obligeant Anou à demander la création d'un rival : ce sera Enkidou, créé par Aruru à partir d'une poignée d'argile. À quoi ressemble-t-il ? Lisez donc :

"Son corps est couvert de poils
sa chevelure est celle d'une femme
les touffes de ses cheveux
poussent comme des épis de clé.
Il est vêtu comme le dieu Soumouqân.
Il ne connaît ni les hommes ni les pays
sa seule compagnie est l'animal
avec les gazelles il broute l'herbe
avec les hardes il s'abreuve aux points d'eau."

Il s'agit donc d'un être sauvage, non civilisé, en phase avec la Nature, vivant avec les animaux. Rien de plus à signaler pour ce premier point.

II. LE CHASSEUR ET LA COURTISANE
Tablette #02
Tout commence par la plainte d'un chasseur, qui voit Enkidou perturber sa chasse en lui sabotant ses pièges et ses filets. Son père lui recommande alors d'aller voir Gilgamesh à Uruk afin qu'il lui fasse rencontrer une prostituée du temple, qui saura "apprivoiser" l'homme bestial. Le chasseur s'exécute et rencontre Gilgamesh, qui lui donne la courtisane demandée. Cette dernière va alors s'unir avec Enkidou durant "six jours et sept nuits". Le résultat ? Lisez donc :

"Lorsqu'il est rassasié de ses charmes
il lève son regard vers ses compagnons
mais en le voyant les gazelles se détournent de lui
et les bêtes sauvages le fuient."

Voilà donc Enkidou "civilisé", éloigné de son état de nature, prêt à intégrer la civilisation ! Cela tombe bien, puisqu'il veut défier Gilgamesh à Uruk, qu'il est déjà en marche.

III. LA RENCONTRE
Tablette #02
Voilà Gilgamesh sujet à de mauvais rêves, et qui demande conseil à sa mère Ninsoun. Au premier, la déesse y voit "un compagnon fidèle et plein de force qui te viendra en aide". Au second, la même chose. Gilgamesh est alors exalté :

"Que ce rêve se réalise
par la volonté du grand Enlil.
Que j'aie un ami et un conseiller fidèle.
Moi, je lui serai ami 
et compagnon fidèle."

Et son rêve va naturellement se réaliser. Les deux "hommes" finissent par se rencontrer après les plaintes des habitants d'Uruk contre leur souverain.

"Enkidou barre la porte de la maison nuptiale.
Avec son pied
il empêche Gilgamesh d'entrer.
L'un tenant l'autre ils luttent.
Tels des taureaux sauvages ils mugissent
ils brisent le montant de la porte
et le mur tremble."

De ce combat sans vainqueur va naître une belle amitié entre les deux hommes, s'embrassant alors pour sceller leur amitié. Voilà donc les deux être les plus puissants devenus les plus grands amis !

IV. LA TRAQUE DE HUMBABA
Tablettes #03, 04 et 05
Que peuvent bien faire deux êtres surpuissants devenus les meilleurs amis du monde pour occuper leur temps ? Bah, ils partent à l'aventure bien sûr !

"Dans la forêt demeure le puissant Houmbaba
Tuons-le ensemble
pour détruire le mal sur la terre."

Voilà ce que propose Gilgamesh à son ami Enkidou, pas très enthousiaste par cette demande.

"Je veux monter jusqu'à la Montagne des Cèdres 
et pénétrer dans la forêt, demeure de Houmbaba.
Une hache me suffit pour le combat
mais toi si tu as peur
reste ici, j'irai tout seul."

Et voilà Enkidou convaincu par son ami. Les héros se préparent alors pour leur expédition, se faisant forger des armes neuves. Gilgamesh, lui, prie Shamash et s'en va rendre visite à sa mère Ninsoun :

"O Shamash
Je pars et vers toi je lève la main
pour t'implorer,
garde-moi la vie sauve
ramène-moi à mon pays d'Ourouk
étends sur moi ton ombre
et couvre-moi de ta protection."

J'aime particulièrement le moment entre Gilgamesh et sa mère à l'Egalmah, ce dernier lui faisant part de ses doutes dans sa quête :

"O Ninsoun
j'ai entrepris une tâche difficile
j'ai entrepris un voyage lointain
au pays de Houmbaba
j'ai décidé de mener une lutte
dont j'ignore les conséquences
je veux parcourir une route
dont je ne connais pas les détours.
Jusqu'au jour de mon départ et de mon retour
jusqu'à mon arrivée à la grande Forêt des Cèdres
jusqu'à ce que je tue le géant Houmbaba
et que j'efface de la terre
tout le mal que hait le dieu Shamash
o divine Ninsoun
implore Shamash pour moi !"

Sa mère s'exécute puis demande à Enkidou de prendre bien soin de son fils, comme un frère.

"Je te confie mon fils Gilgamesh
protège-le tout le long du voyage
que cela dure des jours, des mois
ou des années."

Enfin les deux amis partent en direction de la Foret des Cèdres. Le voyage est long, très long, et Gilgamesh fait chaque nuit des rêves étranges qu'il partage avec Enkidou, ce dernier interprétant chacun des propos rapportés. Enfin arrivés devant la Forêt, la peur commence à s'installer chez Enkidou, mais Gilgamesh sait trouver les mots justes pour le remotiver.

"Ensemble, mon ami, nous avancerons
jusqu'au cœur de la forêt.
Chacun de nous défendra l'autre.
Ignore la mort, dédaigne la crainte,
si nous tombons dans la lutte
nous laisserons derrière nous
un nom immortel."

Enfin arrive le fameux combat. Aidés par Shamash qui déchaîne des ouragans contre le gardien de la Forêt des Cèdres, nos deux compères frappent Houmbaba à mort et s'imposent dans une lutte courte et presque trop facile à en lire le récit.

"Houmbaba
seul on ne peut vaincre
mais deux ensemble le peuvent,
l'amitié multiplie les forces
une corde triple ne peut être coupée
et deux jeunes lions sont plus forts que leur père."

"Gilgamesh et Enkidou ont frappé à mort
Houmbaba le gardien de la forêt
et son cri de mort fait trembler
l'Hermon et le Liban.
Ils s'avancent avec leurs armes dans la forêt
et coupent les cèdres.
Sur les rives de l'Euphrate
le courant emporte les cèdres vers Ourouk."

Houmbaba est mort. Gilgamesh et Enkidou sont victorieux de cet être réputé invincible.

V. ISHTAR ET LE TAUREAU CELESTE
Tablette #06
À peine Gilgamesh a-t-il le temps de se remettre de son âpre combat contre Houmbaba que la déesse Ishtar s'éprend de sa beauté (impressionnée par ses prouesses), lui proposant alors de devenir sa femme.

"Viens, Gilgamesh, sois mon bien-aimé.
Laisse-moi me réjouir
du fruit de ton corps,
sois mon époux et je serai ton épouse."

Et devinez-quoi ? Bah Gilgamesh va certainement faire le pire de ses choix, du moins celui qui aura par la suite le plus de conséquences. En effet, ce dernier refuse les avances de la déesse et n'hésites à la critiquer ouvertement, ce qui aura le don de l'agacer.

"Toi, tu n'es qu'un foyer
qui s'éteint en hiver
tu es la porte ouverte
qui ne protège ni du vent
ni de la tempête 
tu es un palais
qui extermine les héros
tu es le turban
qui étrangle celui qui s'en coiffe
tu es le bitume 
qui souille celui qui le touche
tu es une outre
qui inonde son porteur."

Bref, Ishtar en prend pour son grade, sa réputation de femme facile n'étant plus à prouver. Furieuse, elle s'en va alors se plaindre à son père Anu, et jusqu'à le menacer si ce dernier ne lui crée pas le Taureau céleste pour se venger.

"Mon père, crée pour moi un taureau céleste
pour vaincre Gilgamesh et le tuer !
Si tu refuses de me donner le taureau céleste,
je briserai la porte de l'enfer
je ferai sortir les morts
pour dévorer les vivants.
Les morts seront plus nombreux
que les vivants."

Anu finit par lui donner ce fameux taureau, que la déesse Ishtar ramène sur Terre, plus précisément dans la ville d'Uruk ! (Attention, cette bête symbolise l'arrêt des pluies et l'arrivée de la sécheresse, ne l'oubliez jamais au fond de vous). Les dégâts sont considérables, et les morts s'empilent après son passage. Alors Enkidou se saisit de la bête et voilà que Gilgamesh le tue avec son glaive. Lui arrachant le cœur, il dépose ce dernier en offrande à Shamash. La déesse est encore plus furieuse, mais elle ne peut que s'incliner :

"Malheur à Gilgamesh qui a souillé mon nom 
qui m'a humiliée et a tué le taureau céleste."

Voici donc les deux héros devenus de véritables héros, qui n'hésite pas à fêter cela dans le palais du roi d'Uruk, sans se rendre compte une seconde que leur orgueil n'est pas passé inaperçu du côté des dieux...

VI. LES SONGES ET LA MORT D'ENKIDOU
Tablette #07 et 08
Ce long passage commence par des songes d'Enkidou, que ce dernier partage avec son ami Gilgamesh au milieu de la nuit. On apprend que les dieux ont tenu conseil après la mort du taureau céleste et surtout l'affront fait à Ishtar. Leurs propos sont d'ailleurs plutôt houleux :

"Anou disait à Enlil :
"Parce qu'ils ont tué le taureau céleste
parce qu'ils ont tué Houmbaba
et coupé les cèdres des montagnes
ils doivent mourir."
Enlil lui répondait :
"C'est Enkidou qui mourra
mais Gilgamesh ne mourra pas."
Alors Shamash se dressait
et répondait à Enlil le héros :
"N'ont-ils pas tué le taureau céleste
n'ont-ils pas tué Houmbaba sur mon ordre ?
Pourquoi l'innocent Enkidou doit-il mourir ?""

Et voici Enkidou gravement malade, dont la maladie s'aggrave de jour en jour. Sans rentrer dans les détails, s'enchaînent alors lamentations sur lamentations jusqu'à sa mort, qui plonge Gilgamesh dans une tristesse inconsolable :

"Celui qui fut la hache de mon côté
et le force de mon bras
le poignard de ma ceinture
et le bouclier de ma défense ma seule joie et mon habit de fête.
Un démon impitoyable a surgi
et m'a dérobé mon ami, mon petit frère."

"Enkidou ne lève plus les yeux
Gilgamesh lui touche le coeur
son coeur ne bat plus.
Alors comme une fiancée
il couvre le visage de mon ami
comme un lion il rugit autour de lui
il va et vient en regardant Enkidou
comme une lionne à qui on a enlevé ses petits.
Il arrache ses cheveux et les jette à terre
il déchire ses beaux vêtements
et les rejette comme un sacrilège."

Là, on comprend bien que la mort de son ami le dévaste. Mais plus encore, cet évènement va le changer, lui et ses ambitions. Désormais, Gilgamesh s'est mis en tête de rencontrer Outa-Napishtim, le seul survivant du Déluge (oui, oui, il s'agit bien d'Atrahasis), afin de recevoir la récompense de l'immortalité. Voici ce que désires Gilgamesh maintenant : l'immortalité !

VII. LE LONG VOYAGE
Tablettes #09 et 10
Le voyage de Gilgamesh par une lointaine montagne portant le nom de Mashou :

"Cette montagne garde chaque jour 
le lever du soleil et son coucher
son sommet atteint la voûte duc iel
et à la base, sa poitrine touche le monde d'En-bas."

Il y rencontre deux hommes-scorpions qui gardent sa porte et lui demande pourquoi il a fait tout ce trajet.

"Je suis venu chercher mon aieul
Outa-Napishtim
l'homme qui a trouvé l'immortalité
je suis venu le questionner
 sur la vie et la mort."

Alors les hommes-scorpions le laissent traverser la porte. Au bout d'un moment Gilgamesh arrive à un endroit sans lumière, mais il continue sans relâche, jusqu'à arriver à un "jardin merveilleux dont les arbres portent des pierres précieuses au lieu de fruits".

Alors apparaît Shamash à Gilgamesh pour le questionner :

"Ou vas-tu Gilgamesh ?
la vie que tu cherches
tu ne la trouveras pas."

Mais le roi d'Uruk est un homme têtu, animé par la volonté d'arriver à trouver ce qu'il cherche. Après une longue marche, il rencontre une certaine Sidouri, l'échanson, celle "qui abreuve de vin les dieux". Gilgamesh est éreinté, son visage est marqué par l'effort et son allure est pitoyable. En le voyant, Sidouri est apeuré par cet être peu fréquentable. Gilgamesh lui explique alors pourquoi il est venu, et la réponse de Sidouri est tout simplement magnifique :

"Ou vas-tu Gilgamesh ?
La vie que tu cherches
tu ne la trouveras pas.
Lorsque les grands dieux créèrent les hommes,
c'est la mort qu'ils leur destinnèrent
et ils ont gardé pour eux la vie éternelle,
mais toi Gilgamesh
que sans cesse ton ventre soit repu
sois joyeux nuit et jour
dans et joue
fais chaque jour de ta vie
une fête de joie et de plaisirs
que tes vêtements soient propres et somptueux
lave ta tête et baigne-toi
flatte l'enfant qui te tient par la main
réjouis l'épouse qui est dans tes bras.
Voilà les seuls droits que possèdent
les hommes."

Magnifique !! Malgré tout, Gilgamesh veut rencontrer Outa-Napishtim et ne pas renoncer. Sidouri ne peut que s'incliner et lui recommander Our-Shanabi, le batelier d'Outa-Napishtim, qui vit dans la forêt, et qu'il finit par rencontrer.

"Maintenant Our-Shanabi
montre-mio le chemin qui mène
à Outa-Napishtim,
indique-moi la route qui mène jusqu'à lui,
si pour l'atteindre je dois traverser les mers,
je le ferai
s'il est impossible de l'atteindre
j'irai errant dans le désert."

Our-Shanabi lui demande alors d'aller dans la forêt et de couper "cent vingt perches de soixante coudées chacune" et de les couvrir de bitume. Gilgamesh ne tarde pas à accomplir cet exploit et à préparer en plus le bateau pour le dernier voyage. Les deux hommes partent du rivage durant un mois et quinze jours, pour arriver sur les eaux de la mort. Gilgamesh doit alors utiliser les cent vingt perches une par une pour pousser le bateau, en faisant bien attention que ses mains ne touchent pas ces eaux maudites. il va même jusqu'à se dévêtir pour se servir de ses vêtements comme une voile !! Le mec est motivé ! Mais voilà ses efforts récompensés : Gilgamesh arrive à Shuruppak et rencontre enfin Outa-Napishtim.

VIII. OUTA-NAPISHTIM ET LE RÉCIT  DU DELUGE
Tablettes #11
Outa-Napishtim est intrigué par la présence en ces lieux de Gilgamesh et lui demande les raisons de sa venue. Gilgamesh, lui, est surpris de voir un être aussi frêle ayant réussi à obtenir la vie éternelle auprès des dieux. Il lui demande alors comment il a fait. S'en suit un long monologue d'Outa-Napishtim sur le Déluge, dont je vous laisserai la lecture. Voici juste quelques extraits :

"Six jours et sept nuits passèrent
les tempêtes du déluge soufflaient encore
les tempêtes du sud couvraient le pays.
Le septième jour
les tempêtes du déluge
qui telle une armée
avaient tout massacré sur leur passage
diminuèrent d'intensité
la mer se calma
le vent s'apaisa
la clameur du déluge se tut."

Après avoir parlé fort longtemps, Outa-Napishtim défie Gilgamesh de ne pas dormir durant six jours et sept nuits. Mais le roi d'Uruk s'endort bien malgré lui et échoue.

"Regarde et contemple cet homme
héros qui cherche la vie éternelle !
Un souffle de sommeil profond
le saisit maintenant et le couvre
comme le brouillard."

À son réveil, Gilgamesh nie avoir dormi mais s'être juste assoupi, mais Outa-Napishtim avait pris le soin de poser un pain par jour endormi, et il y en a six ! Gilgamesh est dépité.

"Le premier pain est desséché,
le deuxième n'est plus mangeable
le troisième est encore humide
la croute du quatrième est blanchie
le cinquième est encore frais
le sixième vient d'être cuit
et pour le septième te voici réveillé."

Outa-Napishtim demande alors à son batelier de ramener Gilgamesh, mais au moment de partir, son épouse prend pitié :

"Gilgamesh est venu jusqu'ici
il a enduré peines et souffrances
que peux-tu lui donner
pour le retour dans son pays ?"

Alors Outa-Napishtim décide de lui dévoiler un secret des dieux : la plante d'immortalité, qui se cueille au fond des eaux.

"Si tes mains arrachent cette plante
tu trouveras la vie nouvelle."

Sans attendre, Gilgamesh s'enfonce dans les eaux profondes et arrive à se saisir de cette plante, avant de remonter à la surface.

"Je vais l'emporter avec moi 
à Ourouk aux remparts.
Je la partagerai avec les gens
leur en ferai manger
son nom sera :
"le vieillard retrouvant sa jeunesse".
Moi-même, j'en mangerai à la fin de mes jours
pour que ma jeunesse me revienne."

Mais encore une fois, l'orgueil et l'assurance de Gilgamesh vont lui coûter cher. En plein voyage de retour, il décide de se baigner dans un puits d'eau fraîche. Alors, un serpent sent l'odeur de la plante et lui dérobe. Cela en est trop pour notre héros désabusé :

"Gilgamesh s'assoit et pleure
les larmes coulent sur ses joues."

Cette fois-ci, s'en est fini de sa quête d'immortalité. Gilgamesh abandonne et rentre à Uruk. Ainsi se termine cette épopée à la fois glorieuse et tragique, mêlant héroïsme et échec, pour un homme divinisé qui se prénommait Gilgamesh !

LE CODE DE HAMMURABI
Le fameux code de lois Hammurabi a toute sa place dans cette section, ne s'agissant nullement d'un mythe. Malgré tout, il est si important que je ne pouvais pas ne pas en parler.


Présentons-le rapidement : il s'agit d'une stèle en basalte de 2,25m de hauteur, qui comprend environ 3500 lignes pour 282 paragraphes, dits "articles". Il est publié vers -1750, soit à la toute fin du règne du roi Hammurabi, et a été redécouvert en 1902, lors des fouilles françaises de Suse. Actuellement, il est exposé au Musée du Louvre.

Alors disons-le tout de suite : Non ! Il ne s'agit pas d'un code de lois, comme son nom l'indiquerait. Voyez-le plutôt comme un recueil de décisions ou de sentences formulées juridiquement, censé faire régner la Justice.





LES AUTRES TEXTES


.II.
La Théodicée babylonienne
Poème de 27 strophes de 11 vers chacun
Composé par Saggil-Kinam-Ubbib, à la fin du 2e millénaire.

.III.
 Le dialogue du pessimiste
(ou Poème du juste souffrant)
4 tablettes ; 5500 vers

.IV.
Le pauvre homme de Nippur

.V.
Les sept sages

La liste des rois sumériens (liste royale sumérienne)
Traduite par Th. Jacobsen.
Vers -1820

Le Canon de Ptolémée

La chronique de Nabonide

La chronique d'Asarhaddon

Bérose - Babyloniaka (fragments)

Enmerkar et le seigneur d'Aratta